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Profil KLINE-FOGLEMAN 1 - par Denis MICHEL

Le modélisme permet de s’éclater en réalisant des maquettes fidèles, de pousser ses compétences en électronique ou encore de piloter comme un as. Chacun se reconnaîtra. Mais si piloter du sol présente l’inconvénient de ne pas donner les vraies sensations du vol, ça a aussi le considérable avantage de permettre de tester des trucs nouveaux sans périr dans d’atroces souffrances ni casser du matériel de plusieurs millions d’euros.

Inaugurons donc une série d’article consacrée aux idées expérimentales, voire complètement foldingues, si vous êtes tentés à l’idée de voir si une enclume en EPP peut voler et si les modèles du commerce vous paraissent trop conventionnels. Ces articles pourront peut-être vous inspirer pour de futurs prototypes ou vous inciter à partager vos propres idées.

Enfant, j’ai lu un vieux Science et Vie daté de 1974 qui reprenait l’idée d’un nouveau profil d’avion « révolutionnaire » dit auto-stabilisant et empêchant le phénomène du décrochage en basse vitesse. Ce profil était censé permettre à l’avion en perte de vitesse de tomber à plat sans que l’avion ne pique, et était présenté comme la solution idéale pour les ailes volantes dépourvues de stabilisateur à l’arrière d’un fuselage inexistant.

Un peu d’histoire :

Ce profil porte le nom de ses deux inventeurs Richard Kline & Floyd Fogleman qui n’avaient rien d’autre à faire de leurs heures de bureau que de fabriquer des avions en papier. Dans leur cas, ils ont constaté que le modèle qui comportait un « redant » au milieu de l’aile ne décrochait pas, et un simple avion en papier a finalement abouti à un brevet.

Depuis 45 ans, ce profil a été décliné en toute une famille et a fait l’objet d’étude très poussées, mais il reste très controversé. Le contrôle de turbulences en temps réel reste si complexe qu’aucun avion grandeur nature ne l’utilise pour l’instant. En modélisme par contre, où l’on n’a pas les mêmes exigences, ce profil a un succès grandissant, surtout depuis 2006 et l’essort des avions en mousse et autres ailes volantes.

Pourquoi ce succès ?

Tout simplement parce que c’est simple à fabriquer. Le monde du modélisme se divise en deux catégories (non, pas les bons et les mauvais pilotes, l’autre distinction) : les modèles réalistes avec des profils d’aile classiques, de forme plus ou moins complexes, avec d’une part un bord d’attaque rond, une ou deux courbures, et un bord de fuite effilé, et d’autre part, les modèles dotés d’une simple plaque en guise d’aile, vaguement arrondie sur l’angle d’attaque. Entre l’un, basique et moyennement performant, et l’autre, cauchemardesque à faire quand on bricole une aile en mousse, il existe une troisième voie : le profil Kline-Fogleman.

Un peu de théorie :

Bon, on est entre nous alors on va faire l’impasse sur les diagrammes complexes et les formules indigestes. Laissons ça aux grosses têtes spécialistes en mécanique des fluides.

Tout ça c’est bien beau, mais qu’a-t-il de révolutionnaire au fait ce fameux profil ? Eh bien, comparé à un profil classique, il se comporte de manière comparable à faible incidence (pas d’angle de l’aile avec le vent qui arrive de face). On respecte le principe de l’aérodynamisme qui veut que l’air dévié fait plus de chemin d’un côté de l’aile que de l’autre, créant ainsi une dépression qui « aspire » l’aile vers le haut et crèe de la portance. Comme cela, le profil Kline-Fogleman est déjà considérablement plus performant que la simple plaque de mousse. Il aurait même la capacité de soulever des charges plus élevée qu’un profil classique.

Là où se crée la vraie différence, même avec un profil traditionnel, c’est aux fortes incidences. Au dos d’une aile classique, le flux air doit prendre une pente trop forte pour rejoindre facilement le bord de fuite. Il se décroche de l’aile et c’est la cata : turbulences, instabilité et finalement décrochage. Le profil avec un redant génère moins de turbulences, et celles-ci vont de placer derrière la petite marche. Elles viennent en quelque sorte « combler le trou » de la partie arrière de l’aile, formant un matelas de petits tourbillons sur lequel le flux laminaire glisse. La portance est préservée, même au-delà de 50° d’incidence de l’aile par rapport à l’écoulement de l’air ! Bien mieux, les turbulences exerceraient une poussée contre la marche vers l’avant, au bénéfice de la vitesse et de la portance. Malheureusement, les souffleries modernes ne sont pas conçues pour évaluer une poussée vers l’avant, ce qui jusqu’à présent empêche son adoption par les avions pilotés.

A vous de jouer !

Si donc vous êtes tentés par l’idée de tester vos propres prototypes, voici 4 profils de cette famille atypique aux qualités variées.

KFm 1

Epaisseur 7-9%

Redant à 40% de la corde

Décrochage très doux, très stable, portance modérée, fabrication facile. Toutefois surclassé par le KFm2 qui n’a pas tendance, lui, à faire voler l’avion sur le dos ! Le redant sous l’aile est la meilleure solution en vol supersonique, mais en modélisme, c’est rare…

KFm 2

Epaisseur 7-9%

Redant à 50% de la corde

Décrochage doux, stable, meilleure portance, fabrication facile. Excellent profil pour les petites et moyennes ailes en mousse.

KFm 3

Epaisseur 9-12%

Redant à 50% et 75% de la corde

Fabrication plus difficile. Qualités de vols fantastiques. Haute portance. Décrochage doux. Parfait pour faire décoller les charges lourdes et les planeurs. Selon Kline, supérieur en portance avec le profil classique Clark Y largement utilisé.

KFm 4

Epaisseur 9-12%

Redant à 50% de la corde

Fabrication facile. Rapide et manoeuvrant. Décrochage plus violent que les autres profils de la famille. Bon choix pour les avions très acrobatiques.

Et pour finir un outil trouvé sur le net vous permet de fabriquer votre propre création pour les profils 1 à 3, qui portera peut-être un jour votre nom comme celui de deux glandeurs qui bullaient en faisant des avions de papier avant la pause café.

http://kf.ideabadger.com

Si vous souhaitez approfondir le sujet et que vous avez été attentif en cours d’anglais à l’école, voici des explications de Kline lui-même sur le lien suivant :

http://rcfoamfighters.com/blog/?cat=13

Bon vol !

Denis

Auteur Denis Michel